Nous sommes en 1185. Esclarmonde a quinze ans, fille du Seigneur des Murmures, elle doit être mariée à Lothaire. Le jour de ses noces, elle refuse de dire "oui", et choisit la seule autre option pour une jeune fille à cette époque, la réclusion pour n'avoir que le Christ comme époux.
Emmurée vivante dans une cellule adossée à la chapelle des Murmures, elle nous conte son histoire, sa réclusion et ses réflexions sur les Hommes.
Depuis quelques mois on entend beaucoup parlé de ce roman, qui a reçu le Prix Goncourt des lycéens 2011. Je ne lis pas souvent de littérature contemporaine, cette catégorie fourre tout qui décrit tout les romans qui ne rentre dans aucune autre case. Pleine d'à priori, je l'ai néanmoins emprunté à la bibliothèque, histoire de tenter le coup.
Résultat, un coup de foudre, le premier de 2012, un chef d'œuvre entre mes mains.
Carole Martinez par la bouche d'Esclarmonde nous entraîne dans une histoire méconnue, celle de ses jeunes filles nobles du moyen-âge, mariées de force, qui n'avaient aucun choix et que l'on n'écoutaient même pas. Filles nées pour être mères, jugées impures dès la naissance. Leur seule échappatoiresétant de se prononcer épouses du Christ, seules elles faisaient le choix de s'isoler du monde. D'après le roman, ces recluses étaient communes, sortes de balises vivantes recueillant les confessions et bénissant les pèlerins en route vers Rome ou un autre lieux saint. Quasiment auréolés de saintetés également, leur choix devenait une force, elles qui n'avaient jamais connu le pouvoir de leur voix.
Lorsqu'on rencontre Esclarmonde, elle a quinze et sur le point d'être mariée, elle nous raconte rapidement son enfance heureuse avec son père qui l'adore (à prendre au sens premier du terme), puis nous explique ses raisons. Pourquoi elle préfère être recluse, physiquement emprisonnée mais libre de prier, plutôt que d'être mariée, physiquement libre mais entravé dans un système où seul les hommes comptent. Le raisonnement est poignant et justifié. Sans violence, ni pitié pour ces femmes, Carole Martinez leur prête sa plume pour nous parler d'une autre époque, empruntant leur langage c'est avec une grande tendresse qu'elle écrit.
C'est sûrement cette tendresse qui m'a le plus touché. On sent l'amour infini et le respect qu'elle porte à son héroïne, maîtresse de son destin, petite féministe avant l'heure. Son roman est également très poétique, par des tournures de phrases qu'on sent travaillées et réfléchies mais qui coulent doucement, les pages se tournent sans qu'on est besoin de réfléchir. J'ai aimé cette façon très pudique de raconter où chaque mot est important et pesé, pour ne rien dévoiler trop tôt. Emporté par la poésie des mots, j'ai souvent été surprise par la tournure des événements.
Puis le roman s'est finit, seul, sans même que je ne m'en rende compte.
Ce roman est classé comme contemporain par sa date d'écriture, mais le langage utilisé semble tellement d'époque que l'on pourrait découvrir que c'est en fait un vrai témoignage que ça ne me choquerait pas.
Un livre à conseiller à celles qui aime Jane Austen ou les soeurs Brontë, et à tout ceux qui souhaitent se laisser emporter par une histoire magnifique, écrite avec génie.
1 commentaires:
C'est peut-être pour ça que je n'ai pas accroché à la narration alors ! J'ai toujours eu du mal avec les Brontë ou les livres d'Austen... je n'avais pas fait le rapprochement mais c'est vrai qu'ils ont pas mal de choses en commun.
En tout cas, même si l'histoire en elle-même m'a beaucoup plu, je dois dire que j'ai trouvé ce roman particulièrement froid.
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